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Thème 5 :"Celui qui demeure en moi, celui-là porte beaucoup de fruit" Jn 15,5

Demeurez en moi… Demeurez en moi comme je demeure en vous…

Rappelons-nous du commencement de l’Évangile selon saint Jean. Les apôtres demandent à Jésus : « Où demeures-tu ? »



C’est important ; s’ils veulent entrer dans l’intimité de Jésus, il faut qu’ils aillent chez lui. On en fait l’expérience : connaitre quelqu’un qu’on croise dans la rue, c’est une chose ; mais si un jour on est invité à aller chez lui, ou si on l’invite soi-même, alors on sait que la relation s’est approfondie : on a été là où il demeurait, on y est demeuré quelques moments avec l’autre.

Et nous, où demeurons-nous ?

Et nous, où demeurons-nous ? Où avons-nous posé nos bagages ? Où nous sommes-nous installés ? Où pouvons-nous dire : « Ici, je suis bien, je me sens vraiment chez moi » ? Jésus, en tout cas, nous invite à ce que cela soit en lui : « Demeurez en moi », dit-il.

Pour exprimer cette intimité – demeurer en lui – Jésus utilise la magnifique image de la vigne. La vigne est signe de joie, d’abondance : telle est l’image que Jésus choisit. Comme le note Benoit XVI, en disant : « Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments », Jésus formule une « identification inouïe » entre lui et nous. Le pape émérite ajoute que cela  signifie en réalité “Je suis vous, et vous êtes moi” .

Telle est l’intimité que le Seigneur désire avoir avec nous. Voilà pourquoi il nous invite : « Demeurez en moi, comme moi en vous ». C’est une invitation douce et puissante, à laquelle il nous appartient de répondre. Nous sommes mis face à une décision : entrerons-nous ? Benoit XVI, à nouveau, considère qu’il y a là le choix d’une vie, « la signification fondamentale de notre décision de vie ».

 

ancrage solide,  enracinement de vie

Berna, évangile et peinture
Berna, évangile et peinture

Ce choix cependant, nous le sentons, est celui de la vie, celui du fruit plutôt que du feu (« Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent »). Celui d’un ancrage solide, d’un enracinement de vie. Combien connaissons-nous de personnes un peu perdues, qui ne « savent pas où elles habitent », qui manquent de points d’appui, de repères… Nous, nous voulons être branchés à Jésus. Nous voulons l’être dans la stabilité, dans la fidélité fructueuse. Et lorsque Jésus dit « En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire », un non-chrétien demanderait peut-être « mais pour qui se prend-il, ce Jésus ?!? ». Quant à nous, nous savons qu’il dit vrai, et que sans la sève qui monte de son cep, nous serions desséchés. Et lorsqu’il nous arrive de perdre cet attachement à la Vigne véritable qu’est Jésus, nous nous sentons comme une branche morte.

Mais voici un aspect surprenant, que le Pape François souligne : il s’agit d’un « demeurer » qui est « réciproque » : « Lui aussi demeure en nous, pas seulement nous en Lui ». Aussi étonnant que cela paraisse, le pape ose dire que, non seulement nous avons besoin de Jésus, pour être branché sur lui, mais que lui a besoin de nous. Pourquoi ? « Sans nous – que le Seigneur me permette de le dire – il semble qu'Il ne puisse rien faire, par ce que c'est le sarment qui donne le fruit, pas l'arbre, le cep de vigne ». Le Pape continue : « Quel "besoin" – me vient-il à l'esprit de dire – l'arbre de la vie a-t-il des sarments ? C'est d'avoir des fruits. Quel "besoin" – disons-le ainsi, avec un peu d'audace – quel "besoin" Jésus a-t-il de nous ? Le témoignage. […] Jésus a besoin de nous à cause du témoignage. Rendre témoignage en son nom, car la foi, l'Évangile grandit à travers le témoignage ». 

fruit savoureux

Cette réflexion audacieuse sur le fruit dont il est question dans cette image de la Vigne rejoint ce que nous voyons partout dans l’Évangile, y compris après la Résurrection, à chaque fois que le Ressuscité apparait : il envoie ses disciples pour porter témoignage à sa Résurrection, à sa vie, à son amour. « Je vous envoie », « soyez mes témoins ». Tel est le fruit que porte en nous le fait de « demeurer en Jésus, et lui en nous » : c’est un fruit d’amour, de vérité, de paix, de bonté… Et tout cela rend gloire et témoignage au Seigneur. Oui Seigneur, branche-nous à toi, que nous portions ce fruit savoureux, et le monde se régalera de ta présence ! 

 

Père Corentin Sanson


Texte spirituel  commentaire de St Cyrille d’Alexandrie sur l’évangile de St Jean   « Je suis la vigne, vous êtes les sarments ». Saint Cyrille, né vers 375, est évêque d'Alexandrie en 412, et meurt le 27 juin 444. Il est Docteur de l'Église.


Le Seigneur dit qu'il est lui-même la vigne, pour nous apprendre à nous attacher à son amour et nous montrer combien d'avantages nous retirons de notre union avec lui. Et il compare aux sarments ceux qui lui sont unis, ajustés en quelque sorte et fixés en lui : ceux-là sont déjà participants de sa nature du fait qu'ils ont reçu le Saint-Esprit en partage. Car ce qui nous unit au Christ Sauveur, c'est son Esprit Saint.

L'union avec la vigne de ceux qui se joignent à elle vient de leur libre choix ; mais de la part de la vigne à notre égard, cela vient de sa nature. C'est en vertu d'un bon choix que nous nous avançons par la foi, et nous devenons de sa race parce que nous avons reçu de lui la dignité de fils adoptifs. En effet, selon saint Paul, celui qui s'unit au Seigneur ne fait plus qu'un esprit avec lui.

En d'autres endroits de l'Écriture, par la voix du prophète, le Christ est appelé base et fondement. En effet, c'est sur lui que nous sommes bâtis, et nous sommes appelés pierres vivantes et spirituelles, en vue d'un sacerdoce saint, pour devenir une habitation de Dieu dans l'Esprit, et nous ne pouvons pas entrer dans cet édifice si nous n'avons pas le Christ comme fondation. C'est dans le même sens que Jésus dit ici qu'il est la vigne qui engendre et nourrit les sarments.

En effet, nous avons reçu la nouvelle naissance de lui et en lui, dans l'Esprit, en vue de porter des fruits de vie; non pas de la vie ancienne et dépassée, mais de la vie renouvelée par la foi et l'amour envers lui. Maintenons-nous dans cet état, greffés en quelque sorte sur le Christ, attachés coûte que coûte au commandement sacré qui nous a été donné. Évertuons-nous à conserver les avantages de notre noblesse, c'est-à-dire à ne laisser aucunement contrister le Saint-Esprit qui a fait son habitation en nous, et par qui l'on sait que Dieu demeure en nous.

Comment nous sommes dans le Christ, et lui en nous, le sage saint Jean nous l'a montré par cette parole :  « Nous reconnaissons qu'il demeure en nous, et nous en lui, parce qu'il nous a donné son Esprit ».

De même que la souche de la vigne fournit et distribue aux sarments la qualité naturelle qui lui est propre et qui est en elle, c'est ainsi que le Verbe, Fils unique de Dieu le Père, introduit chez les saints une sorte de parenté avec sa nature en leur donnant l'Esprit, surtout à ceux qui lui sont unis par la foi et par une parfaite sainteté. Il les nourrit et fait progresser leur piété, il développe en eux la science de toute vertu et de toute bonté.

 

 

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