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Pentecôte : « Quand il viendra, le Défenseur que je vous enverrai d’auprès du Père… » (Jn 15, 26)

En célébrant la Pentecôte, nous célébrons un événement fondateur pour l’Église, qui a reçu ce jour-là le coup d’envoi de sa mission. Il s’agit d’un événement qui n’est pas à côté du reste du mystère chrétien, comme un appendice.



Pentecôte, une saveur d’accomplissement

Il y a dans la Pentecôte une saveur d’accomplissement : l’événement pascal, la mort et la Résurrection ne sont pas un en soi, elles débouchent sur quelque chose, et sur quelque chose que Jésus avait promis : l’envoi de l’Esprit.

Nous célébrons donc cet événement, et aussi son déploiement dans l’histoire. Nous le comprenons, nous le célébrons : nous ne sommes pas extérieurs à ce mystère pascal (mort et Résurrection du Christ). Nous y sommes intégrés, embarqués, par l’Esprit Saint. Notre histoire personnelle, et notre histoire collective, en tant qu’Église, sont liées à l’histoire personnelle de Jésus, à l’histoire personnelle des apôtres et de tous ceux qui ont reçu l’Esprit Saint à travers l’histoire, et qui ont forgé l’histoire collective de l’Église. La vie chrétienne est toujours sur ces deux niveaux : personnel (on peut même dire : intime), et ecclésial.

 

« des langues qu’on eut dites de feu »

« Quand viendra le Défenseur, que je vous enverrai d’auprès du Père… » dit Jésus. Mais précisément, quand viendra-t-il ? De quoi Jésus parle-t-il ? En ces chapitres 15 et 16 de Saint Jean, il est clair qu’il évoque la venue de l’Esprit après sa résurrection, à la Pentecôte. Pour nous, qui n’étions pas là à Jérusalem il y a 2000 ans, lorsque « des langues qu’on eut dites de feu » se déposèrent sur chacun des disciples, quand ce don de l’Esprit est-il vécu ? Nous pensons tout de suite aux sacrements.

A Pâques, nous avons eu la joie de célébrer le baptême de deux adultes et deux jeunes, ainsi que de plusieurs enfants. Les sacrements sont ces lieux bénis où Dieu vient nous appliquer (comme on applique un baume) la grâce de sa mort salvatrice, de sa résurrection vivifiante... la grâce de son Esprit Saint qui nous établit dans la connexion avec Jésus. Bientôt, c’est le sacrement de la Confirmation que nous célèbrerons pour les jeunes, et pour deux adultes de la communauté : de la même façon, Dieu va répandre la fraicheur de son Esprit pour dynamiser son Église.

 

présence auprès de nous

Jésus, dans l’Évangile de ce jour parle ensuite d’une façon qui peut nous surprendre. A propos de l’Esprit, il dit : « le Défenseur ». Dans le texte grec original, tout simplement : « l’avocat ». Mais avons-nous besoin d’un avocat ? Sommes-nous en procès ? En filigrane, il nous semble que Jésus évoque un contexte de conflit, où il nous faudrait nous défendre. Une fois encore, nous réalisons que Jésus n’a jamais promis monts et merveilles, une vie facile, un bonheur pas cher, à qui deviendraient ses disciples. Non, à notre surprise, il promet un défenseur, comme pour un combat.  

Ce défenseur, c’est l’Esprit, qui est Dieu lui-même (la troisième personne de la Trinité). Voilà ce que notre Dieu nous promet : lui-même. Pour les moments de combat ou d’adversité, Jésus offre l’assurance de sa présence auprès de nous. Voilà l’œuvre de Dieu : être avec nous. Si Dieu s’est incarné, c’est pour être avec nous. S’il s’en va, s’il nous envoie son Esprit, c’est pour être avec nous. « Je suis avec nous tous les jours, jusqu’à la fin du monde », dit le Ressuscité (Mt 28, 20).

Chacun d’entre nous pourrait dire comment l’Esprit Saint est pour lui défenseur. Le psalmiste témoigne de cette expérience, lorsqu’il dit du Seigneur : « tu es mon abri, mon bouclier, ma forteresse ». Chacun d’entre nous pourrait dire contre quoi l’Esprit Saint l’a défendu. Au fond, peut-être contre ceci : la plus terrible des tentations : croire Dieu absent.

Mais au contraire, Dieu est partageur. De sa présence, de sa vie : il envoie son Esprit pour que nous goûtions sa propre vie. Celle que le Père a partagée à son Fils, et que le Fils nous apporte en envoyant son Esprit.

Que l’Esprit vienne donc prendre en nous la défense de ce qui est le plus précieux, ce qu’il a lui-même déposé en nous : la foi, l’espérance, la charité. Et que l’Esprit de Pentecôte mûrisse en nous ce fruit divin, dont Paul dit qu’il est « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi », pour que tous ceux qui ont faim puissent venir y goûter.

 P. Corentin Sanson

« L'envoi de l'Esprit »texte de St Irénée

Extrait du TRAITÉ « CONTRE LES HÉRÉSIES », rédigé vers l’an 180. Irénée de Lyon est le deuxième évêque de Lyon au IIe siècle. Il est l'un des Pères de l’Église.

Quand le Seigneur donna à ses disciples le pouvoir de régénérer les hommes en Dieu, il leur dit : Allez, enseignez toutes les nations, baptisez-les au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.

C'est cet Esprit dont il a promis par les prophètes l'effusion dans les temps derniers, sur les serviteurs et les servantes, afin qu'ils prophétisent. Voilà pourquoi l'Esprit est descendu dans le Fils de Dieu, devenu le fils de l'homme, pour s'habituer avec lui à habiter le genre humain, à reposer parmi les hommes, à habiter l'œuvre de Dieu, pour opérer en ces hommes la volonté du Père, et les renouveler de leur désuétude dans la nouveauté du Christ.

C'est l'Esprit, au dire de Luc, qui est descendu après l'Ascension du Seigneur sur les Apôtres à la Pentecôte, et qui a pouvoir sur tous les peuples pour les introduire à la vie et leur ouvrir la nouvelle Alliance.

C'est pourquoi, s'unissant à toutes les langues, ils chantaient une hymne à Dieu. L'Esprit ramenait à l'unité toutes les races éloignées, et offrait au Père les prémices de tous les peuples.

Voilà pourquoi aussi le Seigneur a promis de nous envoyer le Paraclet, qui nous adapte à Dieu. En effet la farine sèche ne peut sans eau devenir une seule pâte, pas davantage nous tous, ne pouvions devenir un en Jésus Christ sans l'eau qui vient du ciel. La terre aride, si elle ne reçoit pas d'eau, ne fructifie pas ; ainsi nous-mêmes, qui d'abord étions du bois sec, nous n'aurions jamais porté le fruit de la vie, sans l'eau librement donnée d'en haut. Ainsi nos corps ont reçu par l'eau du baptême l'unité qui les rend incorruptibles ; nos âmes l'ont reçue de l'Esprit.

L'Esprit de Dieu descendit sur le Seigneur, Esprit de sagesse et d'intelligence, Esprit de conseil et de force, Esprit de science et de piété, Esprit de crainte de Dieu. À son tour le Seigneur l'a donné à l'Église, en envoyant des cieux le Paraclet sur toute la terre, là où le diable fut abattu comme la foudre, dit le Seigneur.

 

Ainsi cette rosée de Dieu nous est bien nécessaire pour n'être point consumés ni rendus stériles, et pour que là où nous avons l'accusateur, là nous ayons le Défenseur : car le Seigneur a confié à l'Esprit Saint l'homme qui est sien, cet homme qui était tombé aux mains des brigands. Il en a eu pitié et a pansé ses blessures, lui donnant deux pièces à l'effigie du Roi, pour qu'ayant reçu par l'Esprit l'image et le sceau du Père et du Fils, nous fassions fructifier la pièce qu'il nous a confiée, et la rendions multipliée au Seigneur.


Questions

  • Y a-t-il une expérience plus forte de l’Esprit Saint que j’ai faite ? Ou même dans mon quotidien, où vois-je l’Esprit de Dieu à l’œuvre ?
  • Comment je réagis à cette expression choisie par Jésus, à propos de l’Esprit : « le Défenseur » ? De quoi l’Esprit me défend-il ?
  • Paul parle du fruit de l’Esprit (au singulier) et le décline magnifiquement : « amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, fidélité, douceur et maîtrise de soi ». Parmi ces dons, lequel je désire demander à Dieu de façon plus pressante, en cette fête de Pentecôte ? 

 

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