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… Engendré, non pas créé, ‘consubstantiel’ au Père…

Pourquoi cette traduction nouvelle du Missel ? C’était plus simple et plus compréhensible «’de même nature’ que le Père ». Pourquoi avoir changé ?Que de fois ai-je entendu ces réflexions…



Que de fois ai-je entendu ces réflexions… En 1970, quand le Missel de Paul VI avait été traduit en français, la traduction ‘de même nature’ avait été prise pour sa simplicité. Mais elle était non-fidèle au texte latin et surtout à la conclusion des débats théologiques très houleux du 4ème siècle. Plusieurs spécialistes des Pères de l’Eglise avaient  déjà fait remarquer qu’elle n’était pas conforme au Symbole de Nicée Constantinople, formule de foi composée après 325 et 381 en réponse à l’hérésie arienne (d’un prêtre Arius au 3ème siècle).

unité des trois ‘hypostasis’

Prenons de la hauteur dans les débats théologiques du 4ème siècle. Dieu chez les chrétiens, c’est la Trinité, trois personnes (du latin ‘personna’) en un seul Dieu, le Père, le Fils et l’Esprit Saint. Or le mot latin ‘persona’ traduit le mot grec ‘hypostasis’. Et cette unité des trois ‘hypostasis’, c’est Dieu, un (monothéisme). Or ce qui unifie ces trois personnes, c’est leur ‘substance’ (en grec ‘ousia’) divine commune. Quand on va chercher à définir le Christ, on va dire qu’il n’est pas simplement homme, mais qu’il est avant tout Fils de Dieu, de toute éternité. Il est donc (en grec) « de même (homo) substance (ousios) » que Dieu son Père – ce qui donne en latin ‘consubstantiel’. Ce fils s’est incarné un jour du temps. Quelle est l’identité de ce Fils de Dieu devenu homme ? Les théologiens vont dire qu’il est homme et Dieu, et donc qu’il a deux natures (du grec ‘physis’) : la nature humaine et la nature divine. Il n’a pas qu’une nature divine (l’hérésie ‘monophysite’). Et il n’a pas qu’une nature humaine (c’est l’hérésie ‘arienne’). De plus, étant ressuscité, Jésus, monté au ciel, garde ses deux natures, l’humaine et la divine, plus précisément une nature humaine divinisée. Dire que le Fils éternel est de même ‘nature’ que le Père risquait de brouiller les cartes. Voilà le retour du mot ‘consubstantiel’ unifiant l’Eglise dans l’histoire de sa confession de foi.

 

Jésus est pleinement homme et pleinement Dieu

Berna, évangile et peinture
Berna, évangile et peinture

Ces débats-là entre ‘substance’ et ‘nature’ chez le Christ sont pour nous bien loin. Puisque nous changeons de mot, regardons où le mot ‘consubstantiel’ est employé en français. Dans un article sur le rugby, on a pu lire ceci ; « La mêlée et le combat sont les symboles consubstantiels du rugby, les supprimer c'est une hérésie… » (dictionnaire ‘le Robert’). Jésus et le Père sont ‘consubstantiels’, c’est-à-dire ‘de la même facture’, ‘du même bois’, Dieu tous les deux. Mais il faut dire que Jésus est aussi homme, de même ‘substance’ que tout homme (consubstantiel). A travers les mots, il faut surtout maintenir ce qui est la marque de fabrique de la foi chrétienne : Jésus est pleinement homme et pleinement Dieu.

P. Jean Michel Moysan, curé